Gérer la donnée au sein des médias : un enjeu central
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Séminaire du Mastère Spécialisé® Big Data du 28 janvier 2016 avec Pablo Fourcat, Stratégiste Data & CRM Groupe du groupe Amaury
Le groupe Amaury, composé de deux grands pôles médiatiques spécialisés dans le sport : L’Equipe et ASO (société d’événementiel), se situe dans le top 5 français en terme de médias et d’actualités. Pablo Fourcat, stratégiste Data & CRM du groupe, est venu présenter la révolution que sont en train de vivre les médias et de quelle manière la gestion de données est une réponse à cette révolution.
Actuellement les médias subissent une révolution similaire à celle qu’a vécue la musique il y a quelques années, dans le sens où ils doivent adapter leur mode de diffusion en fonction des utilisateurs. Cette révolution a commencé il y a 15 ans avec l’arrivée d’internet et plus récemment avec la propagation des smartphones. En effet, de plus en plus de personnes utilisent leur mobile et les réseaux sociaux, ce qui rend la donnée importante pour les médias qui souhaitent désormais devenir des « Personnal medias » adaptés aux intérêts de chacun.
Le problème est, qu’avec ces nouveaux modes de diffusions, il n’est pas possible de connaitre les goûts de l’audience. Il faut pourtant composer avec eux (par exemple, Facebook permet de diffuser les résultats sportifs en direct). Cette multiplicité des moyens de consommation de contenus impose aux médias de proposer des contenus différents sur les réseaux sociaux que ceux qui sont proposés habituellement ; il faut être plus ludique. Cette adaptation est nécessaire. En effet, la France compte aujourd’hui 50 millions d’internautes (neuf personnes sur dix) qui passent 24% de leur journée sur un site américain (Facebook, Google, YouTube, etc.) et seulement 9% sur les sites de médias français. Il y a donc un véritable intérêt à s’associer aux réseaux sociaux.
Importance du numérique pour les médias
Aux Etats-Unis, une personne passe en moyenne 5,6 heures par jour sur un écran digital dont 51% sur le mobile. Par ailleurs, le fait que le temps passé sur le mobile ait augmenté n’a aucunement affecté le temps passé sur les autres supports digitaux tels que les pages web ; il est venu s’y ajouter. De plus, une étude faisant le parallèle du temps passé sur un support et la valeur publicitaire montre que malgré le fait que la valeur publicitaire la plus importante soit celle de la télévision (37% de temps passé pour 41% de valeur publicitaire), ses tendances sont à la baisse tandis que celles concernant le téléphone (24% de temps passé pour 8% de valeur publicitaire) sont à la hausse. On estime d’ailleurs un potentiel de 25 milliards de dollars de la valeur publicitaire pour le téléphone. Il existe donc un réel marché sur les mobiles et il devient nécessaire de proposer du contenu sur ce support. Auparavant, la répartition des supports médiatiques était bien distincte (RMC via la radio, L’Equipe via le papier et Eurosport via la Télévision) seulement, avec l’arrivée du smartphone, tous ces supports qui n’étaient pas en compétition se disputent désormais la place pour être sur le téléphone.
L’évolution des moyens de diffusion a également un impact sur les informations que les médias possèdent sur leurs clients. En effet, avec la version uniquement papier, il n’était pas possible de savoir quelle catégorie de personnes achète un magazine. Mais le développement des sites web a créé une relation directe permettant la récupération des données du consommateur. Actuellement, avec les réseaux sociaux, nous nous trouvons dans un système hybride car la relation directe est conservée via les pages web mais lorsqu’une personne a accès à l’information via les réseaux sociaux, les médias ne peuvent pas avoir accès aux données de l’utilisateur mis à part la tranche d’âge.
Enjeux stratégiques d’Amaury
L’enjeu majeur d’Amaury est de faire de la donnée un levier de création de valeurs. Il s’agit avant tout de connaitre les clients et leurs comportements (levier marketing), d’augmenter les ventes par les canaux digitaux (valeur commerciale), d’avoir de nouvelles réponses aux annonceurs sur leurs besoins d’hyper-segmentation notamment à travers les cookies (valeur publicitaire) et d’adapter les produits aux comportements et aux attentes des clients (levier produit).
Amaury est donc confronté à trois écosystèmes :
- Les cookies via les anonymes
- Les prospects via les emails et les systèmes de « push ». A ce niveau, on peut entrer dans des mécaniques asynchrones et interagir avec le client.
- Le client via la carte de crédit
Plus on descend dans l’écosystème, plus ce que le client rapporte au groupe augmente (un abonnement client rapporte 120€ par an). Les objectifs de l’exploitation de données sont donc d’augmenter les revenus clients en essayant de trouver les bons leviers pour transformer un anonyme en prospect et un prospect en client. Pour cela, trois projets sont mis en place, respectivement au sein de chaque écosystème, ayant des enjeux tant au niveau technique qu’au niveau de la data science.
- Data Management Platform
Ce premier projet concerne les anonymes. Il s’agit d’une plateforme généralement proposée en mode SaaS (logiciel en tant que service) permettant de récupérer, centraliser, gérer et utiliser les données relatives à la navigation à des fins de « publicité comportementale ». Cela consiste notamment en l’utilisation de cookies et fonctionne à trois niveaux : un premier qui concerne directement Amaury, un second à travers des partenaires de confiance et un troisième via de grandes entreprises américaines qui proposent un couplage de données ou de l’extension d’audience. Les enjeux techniques se trouvent être au niveau de la volumétrie des données, de leur temporalité et du temps réel pour la publicité. Les enjeux de la data sciences touchent le rapprochement multi-device, la temporalité des données (il faut trouver des idées pour prolonger le temps de visite), ainsi que de trouver un système de personnalisation pour pousser à l’authentification à travers une identification gratuite (effet de levier pour les faire entrer dans nos données).
- Vue client
La vue client est un projet qui touche l’écosystème des prospects et consiste en la consolidation des données via les abonnements et les achats (Print / numériques), la navigation (web, mobile, PDF) et les emails et les push (éditorial, commercial et partenaire) dans l’optique de mieux comprendre le client. Il s’agit ensuite de calculer les agrégats (valeur client, dernier accès, dernier clic, centre d’intérêt), de redistribuer les données au Système d’Information (Bases sources, BI, etc.) pour enfin distribuer des tableaux de bords (évolution de la base et chiffre d’affaires, numérique, etc.). Les enjeux techniques concernent la multiplicité des sources de données et la mise en œuvre de KPI « simples » révélant s’il y a chiffre d’affaires ou non. Les enjeux data science sont d’établir le score d’appétence payant (prendre les abonnés actuels et voir les données qu’ils produisent afin de cibler les prospects les plus ressemblants) et de faire une segmentation automatique.
- Vente en ligne
Enfin, la vente en ligne concerne les clients et consiste à interfacer tous les écrans (web, mobile, tablette et partenaires), proposer une gamme de produits (article, PDF, pack de jetons, abonnement à durée libre préférentiellement à un abonnement annuel), simplifier la transaction (tunnels en 3 étapes, achat en un clic) et disposer d’un large éventail de modes de paiement (carte de crédit, chèque, PayPal). Les enjeux techniques de ce projet se trouvent être la disponibilité sur le plus grand nombre de plateformes et de versions ainsi que la désintermédiation croissante. Enfin, les enjeux data science se situent au niveau du « Scoring churn » (voir si un client est sur le départ), de l’augmentation du panier moyen et du développement des services innovants (DataViz, agrégation, résumé automatique, etc.).